samedi 29 mai 2010

La canne à vieux

Il frappe le vieux avec sa canne
pour marcher besoin de place
il frappe hop hop on fait du vide
quand Monsieur passe hop hop
canne l'air de rien un coup en bas
(tibia d'une grosse)
hop sur le caniche (tête trop folle)
le plaisir c'est le cou d'un gamin
à lunettes dont la mère ne voit pas
la mère lèche la petite robe à fleurs
d'une vitrine c'est juste avant qu'elle
ne détourne les yeux sur l'étiquette
au chiffre exorbitant
le coup arrive traître
hop
les lunettes qui tombent
chuinte le gosse maladroit
pour un peu se fait dire
"c'est malin
laisse le Monsieur passer"
un peu secoué du bras
le gamin déboussole
à l'esprit: il y a un truc qui cloche
dans ce monde de fous
et hop passe un peu dansant
le vieux traître
la canne mensongère tremble
perverse regard sourd
devient vitreux (je suis vieux je suis sourd n'ai plus trop toute la tête)
- dans l'esprit de l'enfant "mouais vu l'habileté du bonhomme
il doit s'y connaître en fraude aux allocations vieillesse."
la canne du vieux en attandant qu'il cane
fait la fête aux passants
hop hop hop

vendredi 28 mai 2010

Aujourd'hui

8H34: décharge électrique avec cafetière défaillante
8H56:verseuse explosée
8H57: Marc de café + café dépourvus de contenant
9H56: Trois clics pour les impôts
11H42: retour de manivelle
12H54: carte bleue dans le rouge
14H02: Pâtes sans sel
15H32: la confiture est morte
15H43: vittel sur clavier
16H39: bus 96 à l'heure de la sortie
17H23: rien
19H15: le Téléphone Sonne sur Inter ("pour ou contre la psychanalyse")
19H59: le débat reste ouvert
20H02: la météo marine
20H27: le téléphone sonne (vraiment)
20H43: l'ami fait la gueule sans le dire
20H56: deuxième décharge
il y a des jours où le facteur ne passe pas même une fois

mardi 25 mai 2010

Bartleby

juste qu'elle épongeait la sueur des vieux enfermés dans des salles à manger
à 8H au petit-déjeuner "je préfererais ne pas "
gueuler "mais si mais si il faut manger la tartine allez allez buvez le café allez elle a pas faim ce matin elle est pas de bonne humeur allez mettez -y du coeur y'en a qui à votre âge n'ont plus du tout leur tête allez allez"
JE PRÉFÈRERAIS NE PAS
mais si mais si monsieur il ne va pas s'y mettre aussi hein
allez allez
ma femme est morte je veux mourir
mais non vous êtes en pleine vie tout l'avenir est devant
je préférerais ne pas
on vous demande pas votre avis
à votre âge
allez regardez le foot hein vous aimez bien le foot (bof )e vous mets le foot il aime bien le foot papy (non je suis lillois)
("qui a gagné" le foot je préfererais ne pas)

lundi 24 mai 2010

Le casse à Monoprix

Elle arrive passe en caisse sans arrêt
sourit à la marchande
elle casse fait le casse
tête le sac rempli passe en enculant la file la fille
s'en fout ira derrière les barreaux s'il faut s'en fout passe marche sourit à la marchande c'est un casse de rayons se fera incendier par ses parents inquiets délinquante déglinguée ne pige pas
QU'IL FAUT PAYER POUR BOUFFER
POUR BOUFFER ELLE QUI N'EN A RIEN À FOUTRE DE BOUFFER
EN PLUS IL FAUT PAYER?
Délinquance déglinguée ira mendier une conserve
"du beurre? " à minuit "vous voulez du beurre?"
"Mais c'est qu'on n'en a pas on vend des frites"
"vendez-moi du beurre s'il vous plaît Madame"
à minuit?
vous voulez du beurre
pour moi demain matin
au petit-déjeuner
sur la tartine s'il vous plaît madame.

mercredi 19 mai 2010

Enfants coriaces.

Les enfants coriaces,
promenés en poussette
nourris de babybels
font sourire ceux qui passent
les passants tout-sourire
ces connards de passants
sourient à la marmaille
comme on lance du pain dur
sur le lac d’Annecy
sourient et font grimace
(les enfants sont si blonds,
les enfants sans malice)
donnent des clins d’yeux (n’ont pas de cacahuètes)
font oui-oui de la tête
L'enfant lui crie “connard!”
dans son langage à lui
dans son langage inouï
lui crie un “va te faire foutre”
La mère sourit aussi
au passant souriant
et donne un babybel
à l’enfant en poussette
L’enfant sourit risette
Du babybel content
Le passant dit coucou
à l’enfant tout content
et le père tout fier
sourit à la maman.
Le monde entier sourit
à l’enfant qui content
bouffe son babybel
il pense à la misère
aux guerres et aux sinistres
aux arbres ravagés
Il pense au sdf
à qui tous les passants
font la gueule en passant
devant qui son fier père
a baissé la poitrine
et sa mère comme la fouine
cacha ses babybels.
Pense au trou d’la Sécu
à la dette Africaine
L’enfant pleure en pensant
qu’il sera délinquant.
L’enfant pleure sur le monde
qui lui fait des risettes
lui donne des babybels
et sourires de barbares
L’enfant gueule à présent
L’enfant gueule son mépris
Le monde un peu gêné
le monde ne comprend pas
Et les passants regardent
les larmes de l’enfant
ces larmes dégouttantes
qui coulent comme le sang!
A ces cris maintenant
se rallient les corbeaux
vomissant des fromages
à l’odeur de plastique
Les murailles se déchirent
Les passants font la moue
Pourquoi tant de fureur?
Ils redonnent un sourire
Pour dérider le mioche
Ils font ‘’ainsi font font’’
Mais ne voient rien qui cloche :
De l’enfant désormais
jaillissent des trompettes
et la mort dans ces cris!
Mais le monde ravi
continue ses risettes
Continue son chemin
Des ouiouis de la tête.

mardi 18 mai 2010

les pigeons fatiguent

Ne prennent plus leurs ailes
Traversent les clous quand le bonhomme est vert
Picorent sans faim les papiers gras
des caniveaux ruisselant des usines
Gris ne grognent plus
si l'étourneau s'en mêle
et leur chipe une chips lessivée d'un égout.
Las les pigeons déambulent hagards
et s'écrasent au passage
d'une voiture sans arrêt.
Nul ne leur dira la messe
Trop pollués leur entrée dans l'enfer
leur sera refusée
Le Diable leur dira
"Saletés de volatile! Où c'est qu'vous vous croyez?
Vous avez vu vos griffes! Et en plus vous puez"
Ils baisseront le bec rongé par la vermine
Se diront que c'est vrai,
Faut pas se foutre du monde
ils s'enrouleront le cou dans la corde
dépressive du monde
Las et gris, finiront alcooliques
sous une rame de métro
bouffés par quelques rats
contents
contents pas tellement
eux aussi fatigués
la queue entre les pattes
désireux de mourir
quand la faune agonise autour d'eux
sans plaisir d'avoir bouffé sa part
puisqu'on est dans la chaîne
des bouffeurs de prochains
Les rats n'ont plus la pêche
voient leurs comparses s'éteindre
sans même un ennemi pour les assassiner.
Le jeu sans ses joueurs
n'est plus comme la guerre
et c'est beaucoup moins drôle.
Les rats décolorés d'angoisse
ne prennent plus la peine
de chasser l'étourneau
venu dans la mêlée
leur chiper leur pitance
Las et gris les rats picorent
sans appétit quelques granules
verts ou rances trouvés là sur la route
Ils suicident l'ennui
déambulant hagards
dans le grand purgatoire
de la RATP.

Fille qui s'abîme

depuis quelques temps
reconnue inconnue
SVP donnez signalement
doigts au gril
creusés de Manhattan
oeil sans flamme perdu
brûle cependant le reste
elle s'abîme la peau bleue
cognée par tous le vent
ne connaît ni le nom de son frère
ni comment elle a fait

confond boire et baiser
confond faim et sommeil.

Fille qu'on vole
elle mord descendante
au quartier
parle puis soudain pleure
reconnue entre autres pour
sourire sans merci.

lundi 17 mai 2010

Trémolos.

Trémolos dans les gammes
D’un gosse sans frontières
Chuintement méprisé du vieillard à la canne :
Dégage de là vermine les vieux ont le pouvoir
De s’asseoir où ils veulent et sans qu’ils le demandent
Le gosse écarlate demande trémolo
A sa mère le reçu de son éducation :
Tu m’as dit que j’aurais tous les droits
Dans la vie et ce vieux con me dit
Qu’avec une carte vermeille
Il en a plus que moi.
Un invalide en reste se redresse sur sa jambe :
Permettez la loi c’est rendre tout l’espace
à celui qui mérite
or je suis de la guerre le sinistre stigmate
Ce siège m’appartient!
Le vieux reprend courage et lui sort
« je suis juif !»
L'éclopé mange sa main, la mère dégaine ses gifles
le retraité s’en prend deux
le gosse bouffe une banane
Dégénérée je sors
et marche pieds devant.

dimanche 16 mai 2010

Désolation de façade

Levant le nez
derrière le carreau épaissi
un couple se déchire
une famille se déchire
l'amitié se déchire
Levant le nez encore
derrière un autre vitreux béant
un couple crie d'amour
une famille crie joyeux anniversaire
deux amis chantent un air
Toujours plus haut levé
un homme se branle
une femme se branle
un écran de télévision devant deux enfants brille
je ferme les yeux baisse le front
sens le seuil franchi
dérive un nouveau cap
derrière le carreau sale
on ferme les rideaux.

samedi 15 mai 2010

Subtil.

- Non sans façons
vraiment.

Intransitif.

Manger ne résout rien.
Ne pas manger ne résout rien.
Manger quoi d'abord?
Manger quoi ensuite?
Manger enfin quoi pour finir?
Marcher. Le marcheur philosophe.
Mais pas tous.
Philosopher ne résout rien.
Le lapin est mort, il est cuit maintenant. Il ne peut plus courir.
Il s'en fout il est cuit.
Il s'en fout d'être mort.
Il n'a plus à courir.
Il n'a rien pour linceul.
Le marcheur chasse et prend son arme
Le marcheur à paris est un flic.

Manger le lapin c'est mieux que le laisser pourrir.
Manger puis marcher puis dormir.

Hier je traverse le mur pour faire comme dans l'histoire. Me cogne une fois. Je réessaie. Me cogne encore. L'histoire n'était pas possible! On m'a menti! Et pour tout c'est pareil!
Je me sens laide et sans façons. Je me sens bête et monotone. Je me sens comme un poisson vidé. Je descends et cours au monoprix. Je cours au monoprix. Je cours et il n'y a aucun monstre qui me poursuit. Je cours, j'ai la pupille dilatée comme tous les gens autour puisqu'il est 22H. Le monoprix lui aussi est déjà mort. Depuis cinq grandes minutes. Il n'y a aucun cadavre pour me faire peur. Les gens ont l'air affamé mais pas de cadavre. Pas de pompiers à appeler. Tout le monde est en vie. Aucun mur ne s'écroule. Il n'y a pas de sang.
Qu'ils sont bêtes ces raconteurs qui affirment que marcher fait marcher la pensée.
Non non et non. Tout le monde dehors à 22H05 était en vie hier.
Il n'y avait que le lapin qui avait rendu son âme.
Et sans aucune raison.

Les dents derrière mon crâne
se sont mises à tomber
une à une.
J'ai fabriqué un petit chapelet avec car elles avaient des petits trous et c'était très facile. Une fois mon petit chapelet terminé, j'ai fait une grande prière et j'ai dit que si cela était possible je préférerais ne pas avoir trop mal (la gencive saignait et j'en mettais partout)
J'avais en effet très mal là où il n'y avait plus les dents.
Pour oublier que c'était douloureux, j'ai mis de la musique et j'ai pris une grande grande douche brûlante. Jusqu'à ce que la peau rougisse et qu'une marque violette apparaisse. C'est une manière de se réchauffer, on ne voit plus rien tellement il y a de la buée, on respire les nuages, et on se sent aimé. Vite vite j'ai mis mon pyjama et un pull immense et noir. Et je me suis jetée sur l'histoire où on disait que l'homme passait les murs. Elle était loin derrière car je ne l'avais pas lue depuis des années. Toutes les autres histoires qui étaient devant sont tombées par terre mais ce n'était pas grave non plus car j'ai enfin retrouvé celle que je voulais. Et je savais où elle me disait que c'était possible de traverser la paroi des appartements, et il fallait bien que je sache que c'était n'importe quoi et que ce quelqu'un qui savait que cela n'était pas vrai, c'était bien moi. Il fallait donc que je sois précise car ce qu'elle disait, l'histoire, il fallait que je sache où cela était. et j'ai trouvé là où on m'avait menti! Je pouvais le prouver exactement:"Il y avait à Montmartre, au troisième étage du 75 bis de la rue d'Orchampt, un excellent homme nommé Dutilleul qui possédait le don singulier de passer à travers les murs sans en être incommodé". Certes je me dis que je n'habitais pas le quartier. Montmatre est connu pour la souplesse de sa pierre. Au Père Lachaise, où je me situe, les matériaux sont plus durs pour éviter les fuites désagréables. Sûrement cela pouvait se comprendre. J'étais déçue. Trois feux follets vinrent me consoler en me disant de reprendre la pose. Je pleurais pour fatiguer ma peine et pouvoir tranquillement mourir.